Le projet de ce spectacle a pour origine une compilation, un montage de textes d'Antonin Artaud rassemblés par Luc Laporte, textes de la dernière période de la vie d'Artaud, dite du retour à Paris, et dont ce metteur en scène a réalisé un spectacle avec sa Compagnie Contre ciel.
Luc Laporte avait demandé à Jeanne Heuclin de lire ces textes pour une maquette de son spectacle, à la Maison des Métallos à Paris. La rencontre de ces textes d'Artaud et de la voix de Jeanne Heuclin a fortement impressionné les spectateurs. Cette rencontre nous a donné l'envie impérieuse de monter à notre tour ces textes, en privilégiant cette incarnation vocale, et en l'accompagnant d'images impressionnistes et marionnettistes, qui évoquent les thèmes du texte, dans lequel Artaud parle de l'identité de l'être, de son rapport au corps, à la société, à la religion, au sexe, à la souffrance, en un mouvement ascensionnel, ponctué par la brutalité des rapports avec son médecin de l'hôpital psychiatrique de Rodez, et le verdict invariable et douloureux, l'électrochoc, qu'Artaud dénonce avec force.
Voix enfermée qui éructe et explose, corps enfermé qui se fragmente, se multiplie, toute la dramaturgie du spectacle aura cette double fonction : faire entendre la force, la poésie, la violence du verbe par la voix de Jeanne Heuclin et donner à voir une interprétation marionnettique de ce rituel de vie, de souffrance, de visions et de mort.
'Artaud avait une voix et un concept de la voix, un concept de l'élocution, de la dramaturgie de la voix tout à fait unique. Le lire devrait impliquer qu'on ressuscite sa voix, qu'on le lise en l'imaginant en train de proférer des textes... / ...Ces quelques enregistrements de la voix d'Artaud sont une partie essentielle de son corps, de son corpus. Lorsqu'on entend ses textes, il faut laisser tomber le sens et écouter la nécessité des phonèmes qui s'appellent les uns les autres.'
Padox, avec lequel nous jouons aussi bien dans la rue que dans les théâtres ? Cette marionnette habitable est à la fois un échantillon d'humanité, et la représentation de l'Autre, de l'exclu, de l'étranger. Il nous est apparu en outre que les éléments qui le composaient, masque, mains, manteaux, chaussures, utilisés en multiples, formaient des images décalées, fragmentées, dispersées d'un corps qui rappelait étrangement celui que convoque Artaud dans ses textes.
Nous nous garderons bien d'illustrer le propos d'Artaud ou de le traduire sur un mode réaliste : la marionnette nous en empêche, heureusement. Elle est aussi cet objet de spectacle auquel Artaud se comparait volontiers : "un vieux guignol machiné de la tête aux pieds", un "corps-théâtre atomique".
Cette oeuvre d'Artaud, qui comme le souligne Foucauld, "est oeuvre de folie… et doit se mesurer à sa démesure", est une "géométrie sans espaces", sans limites. à la fois écran, théâtre, musique, chambre d'échos. Peinture et sculpture. Cette absence de limites, cette perte de repères, rejoint le monde de tous les possibles qu'offre de la marionnette. "Le corps est une multitude affolée". Les corps multiples et éclatés de Padox seront cette multitude et cet affolement.
Dans la version salle,
Jeanne Heuclin, dira la parole d'Artaud, seule au milieu du plateau. Elle sera entourée de visions, de "vanités". Images qui seront le prolongement rêvé, cauchemardé, halluciné, de cette voix. Les éléments qui composent le corps de Padox, épars, isolés, mis comme en apesanteur ou en tension seront ces visions fugitives. Ces visions seront traitées en "théâtre noir". Seuls éléments de décor à transformation permanente : un lit, une fenêtre soupirail. Dans un espace noir habité par une succession de tableaux en mouvement.
Dans la version "espace public", le dispositif consistera à investir la façade d'un immeuble neutre,
avec une porte centrale et au minimum 6 fenêtres facilement accessibles et réparties sur 2 ou 3 étages. Le texte sera dit devant l'immeuble par Jeanne Heuclin, au micro, et les fenêtres seront des espaces d'apparition pour des images. On y verra Padox, entier ou fragmenté avec sa multitude de manteaux, de mains, de chaussures, de têtes, mais aussi d'ombres, de lumières. Cette façade d'immeuble sera à la fois le lieu de l'emprisonnement (Rodez, la société toute entière) et celui de l'expression et de la parole libre.
Tout notre travail avec les Padox consiste à mêler des professionnels et des amateurs volontaires, formés au cours d'un stage. Les habitants de la ville qui nous accueille qui participent ainsi à la re-création du spectacle, comme ce fut le cas dans "Padox Migrateur". Mais pour ce projet "Padox-Artaud" nous souhaitons faire appel à des volontaires plus particulièrement sensibles au thème de l'enfermement, de la souffrance, du handicap, de la folie, de la prison, de la maladie. Ils peuvent être des prisonniers, des handicapés mentaux, des malades, d'anciens malades.
L'objet, la figure, la marionnette, matériau brut ou objet élaboré, transfert, exorciste des peurs, parodie des hommes et des sociétés, agit sur les esprits et agit avec esprit. Du théâtre noir au Bunraku, de Marivaux à Lépinois, de Monteverdi à Globokar, la Compagnie explore un champ théâtral où la voix de Jeanne Heuclin et le geste des manipulateurs éveillent des ombres, des fantasmes, des sentinelles engourdies dans notre mémoire. Créée en 1964, la compagnie s'est spécialisée dans l'utilisation de l"objet-signe", de la forme animée qui prolonge le comédien, le sublime, objet de théâtralité essentiel au service du texte, instrument de la célébration théâtrale. Ainsi la Compagnie s'est-elle emparée de toutes les techniques de manipulation, selon les besoins des spectacles : manipulation à vue, théâtre noir, ombres, théâtre de rue, pour la plupart techniques inspirées du théâtre extrême-oriental, Bunraku japonais, marionnettes chinoises, en mettant l'accent sur un travail vocal de récitant que mène Jeanne Heuclin. Au terme de marionnette, la Compagnie préfère pour définir son travail celui de théâtre de figure (du latin figura=représentation). Celui-ci s'articule autour de quatre axes principaux : le répertoire classique, le théâtre et l'histoire, le théâtre musical et les auteurs contemporains, tout particulièrement Gérard Lepinois. De l'écriture de ce dernier, et de la recherche du sculpteur Alain Roussel, est né Padox, personnage de théâtre de rue, image de l'homme universel, de l'autre, de l'étranger.
Padox, c'est vous, c'est moi, c'est l'autre. Il a été inventé et écrit par Gérard Lépinois, créé par Alain Roussel, mis en voix par Jeanne Heuclin. Padox a d'abord été le personnage unique d'un spectacle de théâtre noir, une marionnette pour représenter les hommes, l'homme d'aujourd'hui.
Avec Padox, nous avons joué "La Deuxième Nuit", un spectacle qui a fait le tour du monde, d'Avignon au Chili, de Pologne en Norvège, du Brésil en Espagne, et partout le public s'est reconnu dans ce petit bonhomme écrasé par l'objet, qui lutte, qui bricole, qui invente, qui joue avec les objets et met le monde en jeu. Puis nous avons créé "La Troisième Nuit de Padox", en 1997, "Padox au Parfum", et en 2000 "Variations Padox"
'Les Padox sont des clowns ahuris, capables d'ahurir une ville.'
Nous n'avons pas voulu limiter au seul théâtre noir la vie de cet étonnant personnage : nous avons demandé à Gérard Lépinois d'imaginer que Padox sorte de la nuit du
théâtre et joue au soleil, dans la rue. Il a donc pris taille humaine et comme il devait jouer au milieu de la foule, il est devenu une foule. Il y eut tout d'abord trois Padox, identiques, réalisés par Alain Roussel. Ils se sont mis à habiter la rue, la détourner, la décaler, provoquer un regard différent.
C'est devenu PADOX DANS LA CITE
Notre expérience de huit années de Festival de Colportage à Epinal nous a prouvé, s'il en était besoin, que le théâtre devait aller dans la rue si l'on voulait que la rue aille au théâtre.
On ne joue pas dans la rue comme on joue dans une salle. L'écriture, l'espace, le rythme, la lumière, le son, tout y est différent. Au théâtre on regarde Padox. Dehors on regarde Padox regarder la rue.
Padox a investi les rues. Il a posé son regard sur la ville, la cité, la société, l'individu.
Un regard naïf, ni critique, ni complaisant. Car Padox ne sait pas, il n'a pas d'habitudes culturelles, d'a priori. Il observe, essaye de comprendre, imite.
Le contact de Padox avec la nature en milieu urbain, et plus particulièrement les arbres, est très singulier. Il les écoute, les aime, s'étonne de leur présence et de leur beauté dans le paysage des villes.
Sa faculté d'étonnement est immense, mais Padox recréé toujours du jeu, du décalage, une différence qui inspire amusement, et tendresse.
Pendant 8 années, nous avons fait vivre nos 3 Padox dans les villes, les quartiers, les cités.
8 années, c'est une expérience forte.
Pour ne pas tomber dans la routine, nous abordons maintenant une nouvelle étape.
Changement radical dans notre façon d'aborder la rue : les Padox ne sont plus 3 personnages perdus dans la foule, éberlués et naïfs, mais un important groupe, pouvant aller jusqu'à 40 Padox (c'est le maximum, c'est le nombre de costumes - marionnettes dont nous disposons). Il ne s'agit plus d'individus, mais d'un groupe, d'un choeur, représentant une société. Cette manière de clonage permet de créer un véritable événement dans le paysage urbain, en investissant un immeuble, une place, une rue, un monument. Cette présence forte peut exprimer un message, dont chaque événement ainsi créé sera porteur. Nous pouvons ainsi répondre à des invitations, intervenir dans le cadre d'une fête, d'un thème, d'un événement en particulier.
Contrairement à ce que nous proposions avec nos 3 Padox de rue, il ne s'agit pas de 40 professionnels, mais de personnes volontaires,
comédiens en formation, groupes, associations, que nous formons au cours d'un stage de 3 jours, avant d'aller jouer dans la rue. C'est l'aspect interactif et pédagogique de cette proposition. Il ne s'agit en aucun cas d'un spectacle qui ne ferait que passer dans la ville, mais l'occasion de former des personnes motivées par ce genre d'expérience.
Comédienne, marionnettiste, chanteuse, ancienne élève du Conservatoire National Supérieur d'Art Dramatique de Paris. Et de l'ENSATT Mène dans la Compagnie Dominique Houdart- Jeanne Heuclin une recherche sur les relations entre la voix et le matériau. Principaux rôles :
Au théâtre :
Cie Dominique Houdart-Jeanne Heuclin
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